Émissions de gaz à effet de serre, hausse globale des températures, vulnérabilité des écosystèmes et des populations... Certains effets du réchauffement climatique seront irréversibles durant des millénaires. Publié le 20 mars 2023, ce nouveau rapport du GIEC doit servir de base scientifique en vue de la COP 28 à Dubaï fin 2023.

 Un travail dans la durée

Depuis 1988, le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) évalue :

  • l'évolution du climat et les connaissances scientifiques ;
  • les possibilités de limiter l'ampleur du réchauffement climatique et la gravité de ses impacts ;
  • les possibilités de s'adapter aux changements attendus.

La publication du 6e rapport de synthèse du GIEC, le 20 mars 2023 servira de base pour le premier bilan de l'accord de Paris, qui aura lieu lors de la COP28 à Dubaï, fin 2023.

 

2011-2020 : la décennie la plus chaude depuis 125 000 ans

La décennie 2011-2020 est la plus chaude depuis 125 000 ans ; cela est principalement dû aux activités humaines.

En 2019, la concentration de CO2 dans l'atmosphère est de 410 parties par million (ppm) en moyenne. Ce taux n'avait pas été atteint depuis 2 millions d'années.

Le niveau de réchauffement global de 1,5 °C par rapport à l'ère préindustrielle sera atteint dès le début des années 2030, quels que soient les efforts de réduction immédiate des émissions mondiales de CO2.

Les politiques actuellement en place conduiraient à un réchauffement global de 2,4 °C à 3,5 °C d'ici la fin du siècle, avec une valeur médiane de 3,2 °C.

 

Le changement climatique a déjà touché :

  • l'accès à l'eau et à l'alimentation (réduction de la croissance de la productivité agricole depuis 50 ans) ;
  • la santé (augmentation des maladies vectorielles transmises par les moustiques, mortalité liée aux vagues de chaleur) ;
  • l'activité économique.

Les effets du changement climatique varient selon les régions. Entre 2010 et 2020, la mortalité liée aux inondations, aux sécheresses et aux tempêtes à été 15 fois supérieure dans les pays très vulnérables par rapport aux pays peu vulnérables.

Les émissions de gaz à effet de serre (GES) ont continué d'augmenter fortement au cours de la dernière décennie (en moyenne 56 GtCO2eq par an), mais deux fois moins vite que lors de la précédente décennie. Entre 35 et 45% des GES sont liées à la consommation des 10% de foyers aux plus hauts revenus.

L'objectif de limiter le réchauffement global de 1,5 °C nécessite un pic des émissions de CO2 en 2025 au plus tard puis une décroissance jusqu'à atteindre la neutralité carbone en 2050.

 

Des conséquences catastrophiques

Les effets du changement climatique vont s'intensifier avec le réchauffement mondial :

  • températures extrêmes ;
  • intensité des précipitations ;
  • sévérité des sécheresses ;
  • fréquence des événements climatiques rares ;
  • accélération de la fonte du permafrost et de la glace de mer en Arctique, des glaciers de montagne et des calottes glaciaires du Groenland et de l'Antarctique ;
  • montée du niveau de la mer.

 

Certaines de ces conséquences seront irréversibles durant des siècles, voire des millénaires.

Les risques seront de plus en plus complexes, combinés et en cascade. Ils vont s'aggraver avec le réchauffement climatique dans toutes les régions du monde.

Le 6e rapport du GIEC identifie des seuils de réchauffement qui provoqueront des impacts irréversibles sur la biodiversité.

Certaines limites d'adaptation ont déjà été atteintes, d'autres le seront immanquablement à l'échelle de l'existence humaine.

 

Les 5 points clés du rapport du GIEC du 20 mars 2023

1/ Le pire est à venir pour les enfants nés aujourd’hui

"Les années les plus chaudes que nous avons vécues jusqu'à présent seront parmi les plus fraîches d'ici une génération", martèle le Giec dans son dernier rapport. Dès lors, les enfants nés en 2020 ne connaîtront jamais les conditions climatiques qu’ont connues leurs parents ou grands-parents, y compris dans les scénarios très bas d’émissions futures. Cette nouvelle génération vivra par exemple sept fois plus d'épisodes de chaleur extrême comparé aux personnes nées en 1960. Mais aussi deux fois plus d'incendies de forêt et de sécheresses et près de trois fois plus d'inondations et de mauvaises récoltes.

 

2/ Malgré les alertes, les objectifs de réduction des émissions restent insuffisants

Selon les estimations du Giec, la trajectoire de réchauffement se situe autour de 3,5°C d'ici 2100, avec une marge d’erreur comprise entre 2,2°C et 3,5°C en fonction des politiques publiques mises en place. Ce qui est largement insuffisant. D'après plusieurs rapports publiés au moment de la COP27 de 2022, si nous prenons en compte les contributions climatiques des États à 2030, le réchauffement serait de +2,4°C. En se basant sur les engagements à long-terme, la trajectoire se place à +2°C. Mais cela implique qu'ils soient bel et bien tenus. La prochaine COP28, aux Émirats arabes unis à la fin de l’année, constitue un rendez-vous crucial : il marquera le premier bilan des engagements mondiaux des pays depuis l’adoption de l’Accord de Paris.

 

3/ Au rythme actuel, le budget carbone pour rester sous 1,5°C de réchauffement serait consommé d’ici 2030

Le budget carbone dans un scénario 1,5°C correspond à la quantité maximale d’émissions de gaz à effet de serre que nous pouvons encore émettre afin de limiter le réchauffement à 1,5°C. Selon le Giec, au rythme actuel des émissions de gaz à effet de serre, nous aurons épuisé notre budget carbone restant dès la fin de la décennie. Il faut donc opérer un virage dès à présent pour inverser la tendance. Cela implique de ne plus ouvrir de nouvelles capacités de production d’énergies fossiles et de fermer les sites existants au plus vite. "La fenêtre d’opportunité pour sécuriser un futur vivable et soutenable pour tous se ferme rapidement", insiste le rapport.

 

4/ Il y a une très nette différence entre +1,5°C et +2°C

"Chaque dixième de degré compte", assène le Giec. Si le monde s’est déjà réchauffé de +1,2°C depuis la période pré-industrielle et que nous atteindrons les +1,5°C dès 2030-2035, l’objectif consiste à rester le plus proche possible de ce seuil. Car les différences entre un monde à +1,5°C ou à +2°C sont considérables. Au-delà de 1,5°C, nous augmentons le risque de changements pérennes ou irréversibles, tels que la disparition des coraux par exemple. Le Giec met ainsi en garde contre les risques de points de basculement, notamment au niveau des calottes glaciaires, dont la probabilité augmente avec chaque fraction de réchauffement.

 

5/ Les solutions

Parmi les solutions présentant le plus important potentiel de réduction des émissions avec des bénéfices excédant le coût de mise en place, on trouve sans surprise le solaire et l’éolien, puis dans une moindre mesure la réduction du méthane dans l'industrie des énergies fossiles. Loin derrière viennent le nucléaire, la géothermie, la bioénergie (biomasse, biogaz, biocarburants) et le captage et stockage de CO2. Le message est donc clair : il faut accélérer le déploiement des énergies renouvelables. Pour la première fois, le Giec fait également référence à la sobriété. Les experts estiment ainsi que "l'atténuation du côté de la demande peut réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre de 40 à 70 % d'ici 2050".